En 2023, le chiffre d’affaires des librairies indépendantes en Belgique francophone progresse de 4,9 % par rapport à 2022 pour les seules ventes de livres. Toutefois, une analyse plus poussée nous montre que si la vente comptant progresse (7,5 %), la vente aux collectivités plombe quelque peu les résultats (-2,7 %).
Des chiffres positifs, mais à nuancer
En s’attardant sur les ventes en volume, on remarque ainsi que l’augmentation n’est que de 1,6 % au global. Et dans l’ensemble, c’est le format de poche qui tire son épingle du jeu, avec une progression de l’ordre de 3,2 %. On peut aisément affirmer que ce sont les augmentations de prix appliquées par les éditeurs (3,3 % en moyenne, dont près de 5 % pour le seul format de poche) qui permettent aux libraires de maintenir des résultats résolument positifs.
Tous les points de vente ne sont pas logés à la même enseigne
Si certaines librairies bénéficient encore de l’activité exceptionnelle post-covid (qui a vu de nombreuses ouvertures, reprises et autres agrandissements), il importe de préciser que plus d’un tiers des librairies (36 %) connaissent une baisse de chiffre d’affaires, parfois significative.
Dès lors dans le contexte actuel, doit-on craindre pour l’avenir de nos librairies indépendantes ?
En effet, cette progression du chiffre d’affaires global ne compense absolument pas la forte inflation qui affecte les librairies. Celles-ci se trouvent coincées entre les augmentations de prix (décidées par les éditeurs) inférieures à l’inflation et des charges en hausse constante (que ce soit au niveau des salaires, des coûts de transports ou de l’énergie, pour ne citer que les principales). Alors même si la librairie indépendante fait preuve de flexibilité et d’adaptation, la marge (déjà faible) la place dans une situation de plus en plus fragile.
C’est pour cette raison que le Syndicat des Libraires Francophones de Belgique, en vue des élections à venir, demande au futur gouvernement de porter une attention toute particulière aux conditions économiques de la librairie indépendante : (Mémorandum élection 2024- en annexe- ci-dessous résumé de nos demandes)
1. Maintien et renforcement décret « prix unique » car il est le garant d’une juste concurrence (celle qui s’opère sur un choix de proximité et/ou d’affinité, et non sur un prix).
Concrètement : Certes, le décret a besoin de certains aménagements car il est soumis à la réalité du marché mais il ne peut en aucun cas être vidé de sa substance en jouant sur la liberté du prix ou sur des catégories de livre à exclure.
2. Soutien aux librairies indépendantes en tant que petit commerce local mais aussi acteur culturel et social d’un quartier.
Concrètement : En contrepartie d’une vie de quartier animée par la librairie, soutien communal au payement du loyer, des charges, etc
3. Soutien aux bibliothèques et aux écoles pour qu’elles achètent du livre en librairie indépendante sans exercer une concurrence sur la remise accordée.
Concrètement : Ecoles et bibliothèques doivent établir des partenariats avec leur librairie indépendante la plus proche et bénéficier d’un budget afin de ne pas faire du prix un sujet de concurrence.
Outre cette régulation du marché, le SLFB demande une politique ambitieuse autour de la lecture et de la mise en contact des jeunes avec le livre :
4. Mise en place d’actions qui mettent les jeunes en contact avec le livre et la librairie.
Concrètement : Cela pourrait se traduire par exemple par la constitution d’une bibliothèque de classe : un budget annuel serait alloué pour que les élèves viennent avec leur professeur en librairie afin de choisir les livres ensemble en bénéficiant des conseils d’un professionnel du livre, le libraire.
La librairie indépendante est un lieu indispensable dans une commune, un quartier, un village : lieu de liberté, de diversité, de démocratie, c’est là qu’on partage la passion du livre et de la lecture, véritable enjeu de société qui concerne tous les niveaux de pouvoirs.
